Apprendre une méthode pour maîtriser ces excès de colère qui pourrissent la vie des hommes.
Je suis heureux. J’aime ma vie, ma femme et mes enfants. Je crois que les choix que j’ai fait son les bons. La qualité de ma vie est proche de mes rêves raisonnables (très loin bien sûr de ce rêve là, vous savez… bref !).
Alors pourquoi est-ce que je ressens régulièrement cette colère qui me tue et qui désespère mes proches ? Qui met en danger ma relation de couple pour des futilités.
La colère est utile
Ces jours-là – c’est difficile à expliquer – je rentre à la maison après une journée de travail, une activité individuelle ou une réunion de famille. Et c’est comme si j’étais soudain cerné, enfermé dans un endroit hostile. Tout ici m’agace. Nettoyer, cuisiner, payer les factures, les cris de tout le monde. Et tous ces petits conflits avec elle. Qui durent depuis des années, sans avoir jamais été enterrés. Ni oubliés.
J’ai appris, dans les groupes de parole pour hommes que notre colère est une émotion humaine de base, saine et utile. Comme la tristesse, le bonheur ou la peur. On peut la comprendre et même la dominer. En suivant quelques étapes.
Note : je vis plus en paix avec mes émotions maintenant. Mais il y a encore du travail. Il m’arrive encore de craquer complètement, après une querelle pourtant futile et sans fondement. Et de penser que tout est fini, que je vais perdre ma femme et mes enfants (et mon écran LCD 27 pouces).
1. Sentir la colère monter en nous
Ca peut paraître idiot. Mais il m’arrive souvent que quelqu’un me dise « tu as l’air en colère » ou « est-ce que ça va, tu n’as pas l’air bien ? » en me regardant, parfois avec un peu de peur dans les yeux. Ma réponse est souvent « oui ». Et je crois vraiment que je vais bien. Et je réalise ensuite que non, je ne vais pas bien. Quelque chose ne va pas et je ne sais pas quoi.
Nous, les hommes, avons du mal à nommer nos émotions. Ce n’est pas exclusivement de notre faute. Par l’éducation et la culture patriarcale, nous sommes devenus des invalides émotionnels, dissimulant nos émotions ou les exprimant uniquement avec la violence.
Comment sentir la colère qui arrive ?
Quand la colère monte en nous, elle provoque des changements dans notre corps. La première étape est donc d’apprendre à les connaître et d’identifier la colère quand elle arrive, avant qu’elle ne soit remarquée par d’autres. Avant même que nous en ayons conscience.
Il y a plusieurs types d’effets physiologiques et chaque homme devrait chercher à identifier ceux qui lui correspondent. Les joues chauffent, le cœur bat plus vite, le dos se raidit, les articulations se rigidifient, le souffle devient plus court, les mâchoires se serrent, soupirs incontrôlés, les yeux sont douloureux, certains ressentent même un chat dans la gorge. Prenons une semaine pour tenter de ressentir nos signaux de colères.
Note absurde : bien sûr, ces effets peuvent être causés par d’autres problèmes. Si vous les ressentez tous, en même temps, c’est peut-être plutôt un infarctus. Auquel cas, il vaut mieux s’approcher d’un médecin que de réfléchir à sa colère !
Une fois que c’est plus clair, nous sommes capables d’une nouveauté émouvante pour un homme : identifier une émotion de base lorsqu’on la ressent, avant que quelqu’un d’autre nous dise que nous la ressentons. C’est facile. Moi, je me suis senti grandi après cette seule première étape.
2. Comprendre la colère
C’est une émotion humaine de base. Utile et normale. Nous devons la ressentir parce qu’elle fait partie des fonctions du cerveau. Il faut la tolérer. En nous autorisant à être en colère aussi souvent que nous en avons besoin, on se défend, on reste éveillé et lorsque c’est nécessaire cela nous permet d’éviter des dangers immédiats.
La colère consiste à nous en prendre à un obstacle que nous jugeons responsable d’une frustration.
Comprendre que c’est normal et que c’est souhaitable m’a permis d’accepter d’être en colère. Souvent. Presque une fois par jour au début. Et puis d’évoluer pour tenter de ne plus être cet homme désagréable que j’étais de plus en plus souvent à la maison. Réalisant que ma vie était géniale, mais que j’étais incapable d’en profiter réellement, caché par un voile de détails qui me fâchaient, guetté par le naufrage.
3. Un homme avec un thermomètre inclus
Pour maîtriser sa colère au quotidien. Pour retrouver du plaisir dans la vie en nous débarrassant de ces émotions mal gérées, utilisons le thermomètre imaginaire qui mesure notre colère, de 0 à 10
Où sommes-nous placés sur cette échelle à différents moments de la journée, de la semaine ? Essayons durant une semaine d’y penser.
Sommes-nous à 0, c’est-à-dire qu’on se sent absolument détendu ? A 2, 3 ou 4, c’est-à-dire que nous ressentons de la colère, mais qu’elle ne nous fait pas perdre le contrôle ? Ou plus haut, en ayant passé à la rage, difficile à contrôler, menant à la violence ?
L’outil est simple. Il n’est pas nécessaire d’être absolument précis dans l’évaluation de nos états d’âme. Parce que nous ne serons pas capable d’être précis lorsque nous serons vraiment en colère.
Températures
0 : je me sens bien, ciel bleu
1-3 : VERT, je maîtrise la colère et je peux éviter qu’elle augmente
4-6 : ORANGE, je n’arrive pas à maitriser la colère en restant dans la situation
7-9 : ROUGE, je ressens de la rage, la colère est devenue incontrôlable. J’ai besoin d’aide. Le risque de passage à la violence est très élevé.
10 : je suis dans le pire était de rage de ma vie.
Combien de fois suis-je rentré à la maison, près de ma femme ou de ma famille, en étant à 3 sur cette échelle ? Je veux dire, combien de fois ai-je passé le seuil de la porte en étant DEJA à trois ?
Et bien.. très souvent à dire vrai. A cause de mes soucis, du trafic, des collègues, des factures, du métro ou de n’importe quelle autre raison frustrante. En fait, je suis presque toujours à 3 en arrivant à la maison.
Au premier problème à affronter, même minuscule, à la première nouvelle ennuyeuse ou tâche qui m’agace : BOUM ! Je passe à 4, 5 ou 6 !
Ce n’est donc pas la vie de couple, la vie de famille ou mon lieu de vie qui me font peiner à maîtriser ma colère : ce sont les autres éléments frustrants qui fabriquent un terreau fertile et dont il faudrait se débarrasser.
De la colère à la rage, puis à la violence
C’est la zone orange. Dans un instant, sans bonne raison, je sors de la zone que je peux contrôler. Ma colère devient de la rage. Cette perte de contrôle me fait souffrir, je m’en veux. Cela ajoute encore à la montée infernale.
La rage est une émotion aussi. Elle est difficile à contrôler. Elle provoque souvent la violence. La violence est une attitude. C’est un choix. Les violences physiques ou psychologiques dans le couple, ou dans la famille, sont générées par la colère non maîtrisée qui devient de la rage.
On comprend maintenant que les mari et les pères violents ne le font pas uniquement à cause des problèmes domestiques. Qui paraissent souvent anecdotiques par rapport aux conséquences. Mais parce que l’homme n’apprend pas à maîtriser sa colère.
Les soucis additionnés, les frustrations et l’absence de gestion des émotions et de connaissance de soi-même font le lit des relations familiales qui échouent.
4. Temps mort !
Utiliser le thermomètre qu’on vient de découvrir est assez simple. Comme pour une voiture. Si notre cerveau est un moteur. Que faisons-nous si :
- Le moteur chauffe – ralentissons pour éviter qu’il ne chauffe davantage
- Il est vraiment chaud – arrêtons-nous dans un lieu sûr et attendons qu’il refroidisse jusqu’à une température supportable. Reprenons la route.
- Il va brûler – sortons de la voiture, appelons de l’aide.
Nous pouvons faire de même avec nos colères !
Lorsque notre colère franchit le niveau 3, il faut refroidir immédiatement ! C’est à ce moment qu’il faut utiliser le dernier outil : le temps mort.
Cela signifie qu’il faut sortir de la situation problématique et rejoindre un lieu sûr. Ce lieu sûr est un endroit qui vous fait respirer ou une activité qui vous permet de faire redescendre la température.
Le choix du lieu sûr est individuel et il est très important. Je me suis trompé au début en pensant que fumer une cigarette hors de la pièce était un lieu sûr. Je ne faisais que gamberger et remuer la situation sans refroidir. Pour moi, c’est l’activité sportive, même courte, qui fait l’affaire. A chacun sa méthode ! Dans les situations complexe, le fait de fermer les yeux, de respirer à fond calmement et de nous concentrer sur l’air qui entre et sort peut suffire.
Il faut être capable de descendre de 2 degrés au moins sur le thermomètre, en quelques minutes.
Note : le temps mort est un formidable outil pour maîtriser sa colère. Pour qu’il fonctionne, il faut avertir vos proches que vous avez appris cette méthode et que vous souhaitez essayer de l’utiliser pour gérer vos humeurs. Expliquer que lorsque cela vous arrivera, vous direz « j’ai besoin d’un temps mort ». Votre compagne ou vos enfants peuvent parfaitement comprendre. Vous serez même surpris de constater qu’ils trouveront que c’est une excellente nouvelle que vous fassiez la démarche de corriger cette tendance à la colère.
5. Retour au calme
De retour dans la zone verte. Retourner auprès des autres, dans la situation initiale, calmement. Les problèmes qui ont généré la montée de température peuvent être traités rapidement ou abordés dans une discussion complète. Choisissons alors d’expliquer ce qui nous a mis en colère en utilisant le discours à la première personne et les verbes de sentiment : je me sens, je crois que, je regrette, je suis déçu, je suis triste, etc.)
En se familiarisant avec ces étapes, en apprenant à s’écouter et à se connaître, on peut anticiper plus facilement l’arrivée de nos colères et faire descendre la température.
Il y a même une chance de découvrir des nouvelles manières d’organiser ses journées ou sa vie en fonction de ces nouvelles émotions que nous avons domestiquées.
Note de publication : cet article, traduit par l’auteur, a été publié sur le site The Good Men Project le 5 octobre 2013.
Si cette manière d’aborder la colère des hommes vous intéresse, si vous souhaitez la compléter, l’essayer, la transmettre aux hommes que vous connaissez qui pourraient l’utiliser ou l’expliquer à vos garçons, nous serons heureux de lire vos commentaires ci-dessous.